Née à Genève (Suisse), Florence Bégoin-Guignard y a poursuivi ses études de
psychologie clinique et a collaboré avec Jean Piaget, André Rey, J. de
Ajiuraguerra et G. Garrone dans plusieurs cadres de recherches et de
publications, notamment du Fonds National Suisse de la Recherche
Scientifique.
Par ailleurs, elle a effectué sa formation psychanalytique à
Genève avec R.de Saussure, O. Flornoy, René Spitz, et à Paris avec S.
Lebovici, R. Diatkine, M. Fain, P. Luquet notamment.
Psychanalyste d'adultes
et d'enfants, membre titulaire de la Société Psychanalytique de Paris, elle
a particulièrement approfondi la pensée de certains auteurs anglo-saxons, tels
M. Klein, D. Winnicott, H. Rosenfeld, W. Bion et D. Meltzer.
Elle a
publié sur divers sujets, notamment l'identification, la genèse des troubles de
la pensée, la féminité et la maternité et des problèmes de technique
psychanalytique.
OEdipe et la horde primitive
Culpabilité et
mentalité de groupe
Introduction
En
choisissant d'aborder les rapports d'Oedipe avec la horde primitive sous l'angle
des rapports de la culpabilité avec la mentalité de groupe, j'ai bien
conscience d'entrer à mon tour dans l'innombrable cohorte des psychanalystes
qui, à un moment ou à un autre de leur carrière, et à la suite de Freud
lui-même, se sont laissés tenter par 1'approche psychanalytique des
phénomènes de masse et par les rapports de l'individu au groupe.
Sans
alourdir mon exposé par l'énumération de mes prédécesseurs en la matière, je me
contenterai de rappeler qu'en France, c'est Didier Anzieu qui est le chef de
file d'une Association à laquelle nous devons de nombreux et très riches
travaux sur le sujet, travaux auxquels je ne peux que recommander de se
référer. Bien qu'elle soit limitée, mon étude recoupera certainement
plusieurs de leurs paramètres, puisqu'elle prend notamment appui sur deux
auteurs qui leur sont familiers : Freud et Bion. La diffusion en France des
idées de ce dernier sur les groupes leur doit d'ailleurs beaucoup.
En
tout état de cause, mon propos est de repérer et d'examiner les impacts, souvent
paradoxaux, qu'exerce la "mentalité de groupe" phénomène archaïque et
déroutant, sur l'organisation oedipienne de la psychologie individuelle.
1. Hugo, ou le groupe dans l'individu
Depuis que les
découvertes psychanalytiques sont tombées dans le domaine public, depuis
qu'elles s'étalent dans les médias, enrichissent les publicistes et se
vendent jusque dans les supermarchés, nous nous sommes habitués à entendre
parler, à tort et à travers, de Complexe d'Oedipe, de culpabilité ou de
dépression. Proteste-t-on parce qu'on est bousculé dans une file d'attente,
nous voilà traités de "parano". On ne dit plus : "J'ai oublié le nom de telle
personne", mais "je 1'ai refoulé". Insiste-t-on auprès d'une standardiste
pour obtenir un correspondant, elle nous qualifie 'd'hystérique".
Empêche-t-on le coiffeur de couper trop court nos cheveux, le voilà qui
parle d'angoisse de castration, etc.
Qu'en est-il, alors, de la
psychanalyse dans le cabinet du psychanalyste aujourd'hui ? Nous rencontrons
un nombre croissant de gens "avertis" de la chose analytique, qui déclarent
très bien savoir qu'ils ont un Inconscient, mais pensent l'avoir démasqué
une fois pour toutes.
L'un d'eux servira de fil conducteur à ma réflexion.
Hugo, 45 ans, est un homme de belle prestance, dont la réussite sociale
et professionnelle est indiscutable. Courtois et rompu aux relations
mondaines, il évoque la manière dont il a entendu parler de moi et me
complimente sur la vue que l'on a de mon cabinet de consultation, impliquant
discrètement qu'on ne s'y attend pas au long de la voie d'approche...
Il consulte parce qu'il ne comprend pas pourquoi il ressent encore
et toujours un mal-être après avoir aménagé son existence en fonction de ce
qu'il croyait être le meilleur plan de satisfaction de ses désirs. N'ayant
pas hésité, pour ce faire, à détruire, puis à reconstruire, deux noyaux
familiaux, il a élevé ses diverses "couvées" dans une promiscuité qui leur tient
lieu d'intimité et se montre sincèrement blessé lorsque ses enfants,
auxquels il ne refuse rien, ne partagent pas son enthousiasme pour cette
joyeuse convivialité qui, pour Hugo, constitue la preuve qu'il a "résolu son
OEdipe" et "dépassé sa culpabilité".
Assaisonnant son discours de quelques
remarques destinées à me faire saisir que la psychanalyse est un objet de
culture bien connu de lui, il exprime ses doutes quant à l'efficacité de la
méthode en ce qui le concerne, évoque en passant quelques échecs
retentissants observés chez ses amis et relations, et me laisse entendre de
façon très séductrice que, s'il est venu me voir, c'est parce que, d'après
ce qu'il prétend savoir de moi, je pourrais peut-être faire un miracle.
Nous voici donc d'emblée embarqués sur un plan factuel et dans un
rapport de force: Hugo se dit prêt à se soumettre aveuglément à ce que je
lui conseillerai de faire, pourvu que je fasse la preuve de ma
toute-puissance magique. En fait, la raison pour laquelle il me consulte
concerne son désir de modifier une fois de plus sa situation extérieure, et
il attend de moi, sous le couvert d'un avis autorisé, le cautionnement de
son projet.
Celui-ci est présenté sous son meilleur jour ; on croirait
entendre un plan de réforme de 1'éducation ou de la fiscalité : auparavant,
tout était mauvais, désormais, tout sera parfait.
Je tente alors de
l'orienter vers un aspect un peu plus personnel et affectif de la situation, en
lui demandant comment lui et ses proches ressentent la perspective de
l'exécution de son plan.
Hugo fait l'impasse sur ses propres sentiments et
répond immédiatement que, certes, sa compagne actuelle va souffrir de ce
changement pas ses enfants, dont il affirme avec sérénité et conviction
que rien de meilleur ne pourrait leur arriver que la séparation de leurs
parents qui sont en conflit constant , mais il est évidemment prêt à
dédommager matériellement cette compagne il sous-entend qu'il sait se
montrer généreux et qu'il en a les moyens.
Prêt également à lui
témoigner une infinie mansuétude, non dépourvue de commisération à l'égard
de ce qu'il considère comme son incompréhension face au principe de réalité.
Il détecte infailliblement les mouvements de projection... chez elle,
bien entendu et s'étonne de ce qu'un femme aussi intelligente n'accepte pas
qu'il ne l'aime plus, et ne comprenne pas qu'il est raisonnable de
considérer cette situation comme un fait et d'agir en conséquence.
Bien
entendu, Hugo me consulte après que tout a été mis en oeuvre pour tenter, en
vain, de remédier à ce désaccord, et me fait entendre que je serais mal
venue de remettre sur le chantier les données du problème. Il doit saisir
sur mon visage, à ce moment précis, une expression de doute, dont je ne me
permettrais pas d'affirmer qu'elle est pure projection de sa part. Toujours
est-il que je vois apparaître, dans la suite de son discours, une avalanche de
griefs à l'égard de la personne objet du conflit, et que je découvre bien
vite que cette compagne constitue "l'ennemi à abattre" afin d'instituer un
ordre social meilleur dans le microcosme d'Hugo.
Parallèlement, en
filigrane de son discours, j'entends filtrer des éléments de méfiance et de
persécution à mon égard, indiquant que je suis passée, du fait de mon
silence dubitatif, dans le camp de l'ennemi, selon la formule classique :
"Qui n'est pas pour moi est contre moi".
J'aggrave alors délibérément mon cas en lui demandant si j'ai bien
compris que selon lui, ses enfants ne souffriraient pas de leur écartèlement
entre leurs deux parents. Je fais ceci dans l'espoir d'apercevoir, au
travers de ce qu'il pourrait projeter en eux, un peu des souvenirs affectifs
("memories in feelings", M. Klein) constitutifs de sa propre névrose infantile.
L'effet ne se fait pas attendre : je rencontre immédiatement chez Hugo une
barrière défensive constituée, pour l'essentiel, d'une banalisation forcenée
de tout ce qui pourrait révéler un éventuel conflit intrapsychique.
L'agacement légèrement méprisant avec lequel il écoute poliment mes
discrètes tentatives d'effectuer quelque lien que ce soit entre son désarroi
conscient et une quelconque culpabilité touchant un désir inconscient
s'accompagne d'un raidissement tonique qui fait présager une fuite
imminente. Son argumentation est toujours la même et peut se résumer
ainsi:"J'entends bien que vous voulez me faire parler de mon Complexe
d'OEdipe, je sais bien que tout le monde en a un, et puis, c'est votre rôle
naturellement. Mais croyez-moi, j'ai analysé le mien depuis longtemps, et je
ne ressens plus aucune culpabilité .... alors, dites-moi plutôt ce que vous
me conseillez de faire ?"...
La sagesse et le goût du confort personnel
auraient pu, à ce point de l'entretien, m'amener à lui répondre que je n'en
savais rien et que je ne pouvais rien pour lui. Hélas, je n'ai pas toujours le
courage de renoncer à démasquer une demande thérapeutique, surtout lorsque
je perçois, comme chez Hugo, la fragilité du masque défensif et l'intensité
du désarroi sous-jacent.
Toujours est-il que, poussée par le Diable de la
pulsion épistémophilique autant que par mes identifications à un Surmoi
protecteur car moi, je ne suis pas, comme Hugo, débarrassée de tout
conflit intrapsychique je me décide à prendre - au niveau de mon Moi,
espérons-le le risque de l'acharnement thérapeutique en proposant une
interprétation qui vise précisément le point de vulnérabilité que j'ai cru
repérer au décours de l'entretien.Je remarque simplement : "Votre réticence
à me parler de la relation avec vos enfants me fait me demander si vous
n'avez pas beaucoup souffert dans votre enfance."
La modification qui
survient alors dans l'attitude et le ton d'Hugo est si radical et pathétique
que je songe au "changement catastrophique" décrit par Bion : toute tonicité
semble l'avoir abandonné, il est comme désarticulé dans le fauteuil, tandis
qu'il me regarde avec un effroi mêlé d'admiration.
Comment avez-vous
deviné cela ? me lance-t-il, mi-terrifié, mi-soulagé.
Sans beaucoup
d'illusions sur l'efficacité de ma démystification, je lui réponds néanmoins :
Je n'ai rien deviné, c'est vous qui me l'avez communiqué au travers de
votre difficulté à me parler de votre relation avec vos enfants.
Suit alors un récit, navrant dans la banalité de son malheur, d'un petit
garçon qui, du fait du divorce de ses parents, fut séparé d'eux et de sa
fratrie, pour être placé dans une institution réputée pour ses résultats
académiques et son niveau social. Il en ressortit muni de diplômes "bien
cotés socialement" et d'une éducation mondaine accomplie, Ainsi préparé à la
réussite professionnelle qui fut la sienne, il avait conduit ses deux
mariages à la façon dont il avait appris à mener une entreprise, à ceci près
que le premier s'était fait à la suite d'un coup de foudre et en dépit des
réticences plus ou moins exprimées par l'ensemble de sa famille et de ses
amis, avec une femme issue d'un horizon totalement différent du sien. Il s'était
rapidement retrouvé très démuni au niveau des possibilités de communication
avec elle et avait donc pu projeter en elle les raisons de l'échec de leur
union. Il avait donc pris soin de choisir sa deuxième compagne à l'intérieur
de ses relations sociales de haut niveau, m'indiquant au passage, non sans
tristesse, qu'on ne surmonte pas aussi aisément qu'il le croyait l'empreinte
de son milieu socioculturel. Ils avaient vécu tant bien que mal durant
quelque dix ans, ajoutant deux enfants aux deux premiers issus de son union
précédente. Mais un jour, il avait rencontré parmi ses proches collaboratrices une femme qui, dit-il,
"m'aimait vraiment". De ses propres sentiments à l'égard de celle-ci, il ne
dit pas un mot.
Tandis qu'il déplorait une fois encore avec une colère
froide le désespoir de sa seconde femme à la perspective d'une séparation,
je l'imaginais dans le dortoir de son internat, incapable de s'endormir
parce qu'il était sans nouvelles de sa mère qui, sûrement, ne l'aimait plus,
depuis qu'elle avait "refait sa vie". Je l'entends alors me dire, comme
saisi par une inspiration aussi subite que géniale : C'est ma femme
qui aurait dû venir vous voir ! Maintenant que je vous connais, je vais vous
l'envoyer, car je suis certain que vous pourrez l'aider à accepter mon
départ".
Vous voulez donc la mettre en pension, comme vos parents l'ont
fait avec vous, au nom de leur désaccord ? lui dis-je.
Ma remarque le
décontenança visiblement. Hugo :
Mais... mais puisque je ne m'entends plus
avec elle, il faut bien que je "passe la main" ; et puis, c'est très
différent, vous n'êtes pas une institution, j'ai eu de très bons renseignements
sur vous, je vous ai vue moi-même aujourd'hui, et je suis convaincu
personnellement de vos capacités à l'aider...
Moi : Si vous me
"passez la main", je devrais donc être pour elle le mari que vous ne voulez
plus être, de même que vos parents ont chargé l'institution X de les
remplacer auprès de vous dans leurs fonctions parentales.
Hugo resta
muet, les sourcils froncés, ne sachant pas que faire de ma proposition. Je
poursuivis, après un silence :
Auriez-vous donc pensé que vos parents
vous mettaient en pension parce qu'ils ne vous aimaient plus ?
Hugo
réagit en deux temps : il commença par reprendre son ton mondain pour
m'expliquer que ses parents l'avaient toujours assuré de leur parfait amour.
Puis, comme je restais silencieuse, il se tassa sur son siège, regarda la
pointe de ses chaussures et murmura :
Je me souviens plus de rien d'autre
que de ces insomnies terribles où le temps n'en finissait pas de passer, et
du vide dans ma tête..."
II. Mécanismes de groupe et processus
individuel
Hugo est maintenant en analyse depuis deux ans environ.
Le processus analytique est installé, mais il a fallu beaucoup de temps et
de patience pour permettre à Hugo de s'approcher de sa propre vie psychique.
Chaque fois qu'il pressentait, dans la relation transférentielle, une
situation émotionnelle qui, dans sa répétition, pourrait amener une
remémoration, il commençait par s'en défendre avec l'énergie du désespoir,
utilisant pour ce faire les moyens dont il s'était servi lors du premier
entretien. C'est la nature de ces moyens de défense que je voudrais
maintenant soumettre à une analyse plus détaillée car ils existent peu ou prou
chez chacun et posent à l'analyste des problèmes de conceptualisation et de
technique tout à fait spécifiques et encore mal maîtrisés.
Remarquons pour commencer que ces défenses doivent fort peu à
l'organisation oedipienne d'un Moi authentiquement individualisé.On y trouve
tous les ingrédients du"faux-self" décrit par Winnicott mais, pour croire à
l'existence d'un Moi véritable caché derrière cet aspect "plaqué", il y faut
la foi née de l'expérience clinique ! Bien entendu, l'aspect persécutoire qui
filtre au travers de la culture et de la bonne éducation d'Hugo fait
immédiatement soupçonner un Moi faible, terrorisé par l'existence des
pulsions et des conflits intrapsychiques, et tributaire de défenses drastiques. En d'autres termes,
l'organisation défensive secondaire à l'élaboration du Complexe d'OEdipe
telle qu'elle fut tracée par Freud cède sous les premiers assauts de la
poussée émotionnelle et instinctuelle. Les niveaux de symbolisation et de pensée
secondarisée qui témoignent normalement de cette élaboration oedipienne sont
ici pour ainsi dire inexistants. En leur lieu et place on observe un recours
quasi automatique à des postulats socioculturels qui ont des chances d'être
communs au patient et à son analyste et, au premier chef, à la vulgarisation
du langage psychanalytique. Comme nous l'avons vu avec Hugo, ce langage
opère, dans l'économie du patient, à la façon d'un Surmoi archaïque extrêmement
sévère, qui décode instantanément aussi bien les interventions que les
silences de l'analyste, sans laisser la place à la naissance d'une véritable
pensée.
Certes, on pourrait m'argumenter en posant l'hypothèse d'une
organisation délirante sous-jacente chez mon patient. Je répondrai que,
d'après mon expérience, la composante groupale que je cherche à cerner ici
joue très probablement un rôle fort important dans la formation des délires,
mais que l'intérêt du cas d'Hugo est précisément de n'être pas le cas d'un
patient psychotique.
Je n'explorerai donc pas davantage cette hypothèse
du délire, car je pense nécessaire avant tout d'examiner plus en détail ce
que j'entends par "composante groupale", et dont Hugo nous fournit de
nombreux exemples.
Pour cela je me référerai aux conceptions de Freud et de
Bion, auxquelles j'adjoindrai quelques réflexions à propos de certains
concepts de René Girard.
Freud
Je ne reprendrai pas ici
l'ensemble des travaux de Freud sur les relations pouvant exister entre
l'individu et le groupe social elles sont suffisamment connues d'une part et
d'autre part leur examen détaillé exigerait un autre article. Je me
contenterai donc de rappeler :
· que Freud suppose une répétition de la
phylogenèse dans l'ontogenèse ;
· qu'il met l'accent sur l'importance des
processus d'identification dans la formation du groupe ;
· qu'il
organise toujours ses hypothèses concernant la structure d'un groupe autour de
la
personne d'un leader, origine du totem et des tabous ;
· que
l'identité de ce leader, après avoir été désignée dans Totem et Tabou
(1912) comme
pouvant être d'origine soit matrilinéaire soit patrilinéaire
avec l'hypothèse que la matrilinéaire était la plus archaïque des deux est
devenue résolument paternelle dès Psychologie des masses et Analyse du
Moi (1921), sous le vocable de "père de la horde primitive".
· que
sur la base de ce qui précède, Freud pense retrouver dans les groupes "beaucoup
plus évolués" à savoir l'Eglise catholique et l'Armée la même
organisation autour d'un "père" dont chaque individu formant le groupe
accepterait l'autorité parce qu'il penserait partager l'amour de celui-ci de
façon absolument égale avec tous les autres membres du groupe.
Bion
Wilfred Bion, quant à lui, reprend et développe cette étude de Freud
sur l'organisation groupale. Il définit la "mentalité de groupe" comme
l'expression unanime de la volonté du
groupe. L'individu contribue de façon
inconsciente à cette volonté "volonté", et non pas "désir", le désir ne
pouvant avoir de statut métapsychologique autre qu'individuel volonté
donc, qui le fait se sentir mal à son aise toutes les fois qu'il pense,
désire ou agit en désaccord avec les "présupposés ou postulats de base de
groupe".
La "mentalité de groupe" est un mécanisme d'intercommunication
"mécanisme" et non pas "processus", ce dernier terme ne pouvant, pas plus
que le désir, concerner autre chose qu'une organisation psychique
individuelle et unique. Ce mécanisme est destiné à garantir à tout prix la
cohérence de la vie de groupe au moyen des dits postulats.La mentalité de groupe
permet à un individu d'exprimer ses pensées de façon anonyme, mais elle
constitue en même temps l'obstacle principal au but que cet individu désire
atteindre au moyen de son adhésion au groupe. Les possibilités qu'a un
groupe de satisfaire les véritables besoins et désirs d'un individu sont
donc constamment battues en brèche par la mentalité de groupe. En effet, Bion
définit les"postulats de base de groupe"comme étant, à l'intérieur de chaque
être humain l'expression de l'instinct grégaire et de la non-pensée qui
tendent à régir inexorablement un groupe, sans tenir compte de la
problématique du désir et de la souffrance psychique inhérents à la
structure psychique individuelle.
C'est pourquoi le langage régi par les
postulats de base de groupe ne doit pas être confondu avec un langage
primitif. Il s'agit d'un langage trivialisé1qui ne constitue qu'un mode d'agir
et ne peut se développer en tant qu'instrument de pensée. "Sa simplicité,
écrit Bion, est une forme de dégénérescence et de vulgarité". On peut
rapprocher cette description bionienne de la notion de "pensée opératoire"
développée par Pierre Marty.
On en voit un exemple chez Hugo qui, malgré
son intelligence, sa culture et son éducation, se montre incapable de saisir
les liens symbolisants de mes quelques interventions, parce que celles-ci,
quoique simples, sollicitent, pour être comprises, la mise en oeuvre de sa
structure psychique individuelle et non son adhésion aux postulats de base
du groupe. Or, tout le système défensif d'Hugo est fondé sur ces postulats,
en raison de la terreur que lui inspire le fait de se tourner vers sa vie
psychique interne.
Bion décrit trois types de postulats de base de
groupe mais, tout en installant une certaine hiérarchie entre eux, il
souligne surtout la façon instantanée dont un individu dominé par la
mentalité de groupe peut passer de l'un à l'autre. L'immédiateté de leur
interchangeabilité l'amène à penser que ces postulats constituent peut-être
les différentes facettes d'un seul et même phénomène.
a) Il nomme le
premier de ces postulats "attaque-fuite", postulat dont le groupe prototypique
est l'Armée, et à propos duquel on pourrait citer cette phrase de Freud dans
Malaise dans la Civilisation : "Il est toujours possible d'unir les
uns aux autres par les liens de l'amour une plus grande masse d'hommes, à la
seule condition qu'il en reste d'autres à l'extérieur pour recevoir les
coups". De par sa tonalité persécutive, voire paranoïaque, ce postulat rend
sourd aux besoins et aux désirs individuels des membres du groupe, comme aux
tentatives thérapeutiques de l'objet externe désigné comme leader et, de
façon plus générale, il rend imperméable à toute réflexion et à toute
verbalisation de la situation. Seules ont droit de cité les émotions
élémentaires et interchangeables, telles la panique et la rage. L'attaque ou la
fuite constitueront des réponses instantanée à ces émotions élémentaires,
permettant ainsi aux tenants de ce postulat de faire l'économie de
l'aménagement de la frustration au niveau de leur organisation psychique
individuelle. La personne qui a suscité ces émotions élémentaires peut aussi
bien être attaquée ou fuie comme un ennemi, que plébiscitée en tant que leader
chargé de conduire l'attaque contre des persécuteurs, postulés alors comme
extérieurs.
C'est ce que fait Hugo avec moi, d'une part lorsque mon silence
dubitatif est immédiatement décodé et non
"interprété" par lui comme de la
désapprobation et qu'il se lance dans une attaque en
règle de sa femme, et d'autre part lorsque je cherche à
obtenir de lui quelques éléments de son vécu
émotionnel, et qu'il se montre soudain tendu, prêt
à s'enfuir.
b) Bion appelle le second de ces
postulats le "couplage". L'aristocratie en constitue le groupe prototypique,
et l'émotion prédominante au niveau de ce postulat réside dans l'absolue
mainmise du groupe sur les relations sexuelles et affectives des individus
qui le composent.
La personne à qui est attribué le rôle de leader est
considérée comme un possible partenaire homo- ou hétérosexuel pour chacun
des membres du groupe, ce qui entraîne des craintes de désarroi et de
rivalité et, bien souvent, un retour immédiat au Postulat "attaque-fuite".
La proposition que me fait Hugo en me suggérant de m'occuper de sa femme
puisqu'il la quitte, illustre bien la mise en oeuvre de ce postulat :
puisqu'il lui semble dangereux, soudain, d'être mon partenaire, il m'en
fournit un(e) autre, sans prendre le moins du monde en compte les désirs
respectifs des deux personnes en cause !
c) Le troisième postulat
est nommé "dépendance", son groupe prototypique est l'Eglise, et il implique
que le leader soit considéré comme le seul objet externe capable d'assurer la
sécurité et de satisfaire les besoins d'un organisme immature, constitué par
l'ensemble des membres du groupe qui croit en lui. En raison des exigences
démesurées que cela implique à l'égard dudit leader, l'émotion prédominante
sera ici la "culpabilité". Il ne s'agit pas, bien entendu, d'une culpabilité
névrotique, issue de la résurgence de désirs individuels, mais de quelque chose
qui ressemble à de la "terreur sacrée". Sur ce point comme sur bien
d'autres, notre langage psychanalytique porte les traces de la
"trivialisation" dont parle Bion, et demanderait à être réévalué, afin
d'éviter de réintroduire, de notre fait, un certain degré de confusion dans
l'esprit de nos patients lorsque nous intervenons en séance. La
communication entre analystes y gagnerait également.
Ce postulat
s'observe chez Hugo lorsque, au tout début de l'entretien, après avoir exprimé
ses doutes quant à l'efficacité de la méthode analytique en tant que telle,
il exprime sa volonté de croire en mon pouvoir magique et de s'y soumettre
aveuglément. C'est également en raison de ce postulat qu'il prend mon
silence pensif comme un froncement de sourcils jupitérien et un refus
d'exaucer sa prière, ce qui lui donne envie de s'enfuir. A mon sens, ce
paramètre joue un rôle très important dans tous les cas où, comme on
l'entend dire trop souvent, "il n'y a pas de demande". Si l'on n'analyse pas
l'adhésion du patient à ce postulat de base de groupe, la "demande" risque
bien de ne jamais advenir, précisément en raison de la qualité accablante de
sa "culpabilité".
d) Il existe, pour Bion, une seule forme de groupe
capable de tenir en respect 1'envahissement du champ de communication par
des postulats de base de groupe : il s'agit du groupe de travail dont le but
est en accord avec l'exigence du principe de réalité, et dont le leader se doit,
soit de n'avoir aucun charisme, soit de posséder une personnalité
suffisamment forte et ancrée dans la réalité pour maintenir avec
persévérance, dans son esprit et dans celui de ses partenaires, le but fixé
par le groupe. Dans ce type de groupe, et dans celui-ci seulement,
l'expression verbale est prédominante, riche en symbolisations de divers
niveaux, et dynamisante pour la poursuite du but fixé et pour le
développement individuel de chacun de ses membres. On reconnaîtra ici
également la description du couple analytique, dans les moments rares et
privilégiés où l'alliance thérapeutique et l'atmosphère
transféro-contre-transférentielle suscitent un véritable travail de
remémoration et d'élaboration. D'ailleurs, lors qu'il parle du "couple analytique" dans la suite de son oeuvre,
Bion lui-même associe souvent le concept de "capacité de rêverie de la mère"
ou "identification projective normale", ou encore "capacité de penser"
avec celui de "groupe de travail".
La fin du premier entretien avec Hugo
illustre la description du "groupe de travail" selon Bion, lorsque mon
intervention sur ses doutes de petit pensionnaire quant à l'amour parental,
amène le premier mouvement émotionnel véritable et le premier récit de
souvenir personnel, tellement pathétique : "Je ne me souviens plus de rien
d'autre que de ces insomnies terribles où le temps n'en finissait pas de
passer, et du vide dans ma tête...
René Girard
L'originalité de l'oeuvre du philosophe René Girard m'a semblé
présenter certains aspects qui pourraient venir à la rencontre de ce que je
tente de cerner, à savoir l'impact de la "mentalité de groupe" sur le
fonctionnement psychique individuel. Voici, très succinctement résumés, les
points qui ont retenu mon attention : R. Girard pense être en mesure de
retrouver jusque dans les mythes et les grandes légendes de l'humanité, la
trace d'événements persécutoires et criminels qui seraient réellement
survenus entre un individu ou une minorité d'individus d'une part, et
d'autre part, une foule qui, dans un temps de crise, se serait violemment
substituée à des institutions sociales affaiblies.
Ces événements,
dont le récit se déforme, s'épure et se stylise avec le temps jusqu'à devenir
mythique, surviendraient périodiquement au cours de l'histoire de
l'humanité, toujours dans des époques de grande confusion, par exemple aux
moments de guerres, de chute d'un ordre social, ou lors de catastrophes
naturelles comme la peste ou la famine.
Frappée par un malheur collectif qui
n a pas de sens, la foule cherche à lui en donner un, et trouve un bouc
émissaire sous la forme d'un individu ou d'une minorité, bouc-émissaire
auquel elle attribue la capacité toute-puissante d'avoir déclenché la
catastrophe en question.
Seule la mort de ce ou de ces coupables désignés
amènera la fin du malheur collectif ce qui revient, remarque pertinemment
Girard, à attribuer également au bouc-émissaire une toute-puissance
sacrificielle bénéfique. D'ailleurs, la résurrection de ce bouc-émissaire n'est
pas rare, dans des récits suffisamment anciens pour avoir pris, au cours des
siècles, leur valence mythique.
En tant que psychanalystes, ce
dernier point ne devrait pas nous étonner, puisque nous connaissons les
liens indissolubles de la persécution avec l'idéalisation dans la position
schizoparanoïde. En revanche, cela devrait nous rendre attentifs au fait
qu'il s'agit de phénomènes groupaux ce qui pour- rait nous amener à
considérer ladite position schizoparanoïde comme le creuset par excellence
de l'interaction des postulats de base de groupe avec l'organisation
psychique individuelle. Les conditions du scénario de ces événements sont au
nombre de quatre, et R. Girard les appelle les "stéréotypes de la
persécution", soulignant qu'il s'intéresse là uniquement aux persécutions
collectives ou à
résonance collective comme, par exemple, la persécution des
Juifs lors des grandes épidémies de peste du moyen âge.
Voici ces
stéréotypes.
1) Sous le coup du malheur collectif catastrophes
naturelles, épidémies, menaces de guerre on observe "la perte radicale du
social lui-même, la fin des règles et des 'différences' qui définissent les
ordres culturels..." L'indifférenciation et la confusion engendrent "la
réciprocité des insultes et des coups..." cette réciprocité
mauvaise (qui) uniformise les conduites et... entraîne "une prédominance du
même" une "identification mimétique", dont la forme extrême est le mythe de
la gémellité.
Cette description girardienne me semble pouvoir être
rapprochée du concept bionien de "changement catastrophique", état de
confusion où tout le connu bascule dans l'inconnu, engendrant le désarroi,
la terreur et la confusion, mais pouvant constituer aussi le creuset d'une
réintégration de parties clivées du Self et donc d'une réorganisation plus riche
et plus créative de la personnalité, à la condition toutefois que la
structure psychique individuelle soit plus forte que les postulats de base
de groupe
2) La désignation des crimes que la foule persécutrice
attribue à ceux qui vont devenir ses victimes comporte toutes les
transgressions, l'inceste en premier lieu, toutes les magies et
sorcelleries, et aussi les formes plus édulcorées parce que plus anciennes
et retravaillées par leurs récits successifs des frasques commises par les
dieux et héros mythologiques.
3) La description des châtiments infligés
à ces victimes de l'ire collective est toujours plus ou moins la même ; le
lynchage en est le prototype, et le "coupable" est finalement chassé ou mis
à mort.
4) Les signes préférentiels de sélection persécutrice,
ou"signes victimaires sont les suivants : malformations physiques, anomalies
mentales, statut d'orphelin, d'étranger, mais aussi statut de personne
privilégiée, voire exceptionnelle. La forme extrême des signes victimaires est
constituée par le monstre "Le monstre, dit Girard, est une hallucination
instable qui tend rétrospectivement à se cristalliser en formes stables, en
fausses spécificités monstrueuses, du fait que la remémoration s'effectue
dans un monde à nouveau stabilisé". Plus un individu accumule sur sa tête de
signes victimaires, plus il a de chances d'être désigné par la foule comme
bouc-émissaire, assassiné d'abord, puis divinisé.
Il est aisé de repérer
les quatre stéréotypes de la persécution dans le mythe d'OEdipe raconté par
Sophocle :
1) L'indifférenciation et la confusion sous le coup du
malheur collectif, c'est "la peste" à Thèbes, quelles que soient les
extensions métaphoriques de ce vocable en l'occurrence
2) La désignation
des crimes que la foule persécutrice attribue à celui qui va devenir sa
victime, c'est évidemment le meurtre du père et l'inceste avec la mère.
3) La description des châtiments infligés à ces victimes de l'ire
collective c'est bien entendu, la totale destruction de ce foyer heureux
jusqu'alors, Jocaste qui se suicide, OEdipe qui se crève les yeux avec
1'épingle même de Jocaste, puis qui quitte Thèbes, accablé sous le poids de la
culpabilité des crimes qu'on lui a dit avoir commis.
4) Quant aux
signes préférentiels de sélection persécutrice, ou signes victimaires, OEdipe
les accumule : il est boiteux, étranger, orphelin, il ignore sa filiation,
et il a en outre reçu une éducation de prince ! Il est dès lors tout désigné
pour constituer le bouc-émissaire des Thébains en détresse.
On s'en doute, René Girard croit fermement à l'existence
d'origines événementielles du mythe d'OEdipe. Pour mieux
situer 1'histoire d'OEdipe en tant qu'événement social,
il propose de la "maquiller grossièrement", de lui "retirer son
vêtement grec" idéalisant, de "l'habiller
à l'occidentale" et de laisser au lecteur le soin de la
placer quelque part dans notre histoire, à partir du moyen
âge. Je vous propose d'écouter cette fantaisie girardienne
dans la perspective de l'interaction de la mentalité de groupe
avec l'organisation psychique individuelle : "Les récoltes sont
mauvaises, les vaches avortent, personne ne s'entend plus. On dirait
qu'on a jeté un sort sur le village.
C'est le boiteux, la chose
est claire, qui a fait le coup. Il est arrivé un beau jour, on ne sait d'où
et il s'est installé comme chez lui. Il s'est même permis d'épouser
l'héritière la plus en vue du village et de lui faire deux enfants. Il
paraît qu'il s'en passe, chez eux, de toutes les couleurs !
On soupçonne
l'étranger d'avoir fait un mauvais parti au premier époux de sa femme, une
espèce de potentat local, disparu dans des circonstances mystérieuses et un
peu trop vite remplacé dans l'un et l'autre rôle par le nouveau venu. Un
beau jour, les gars du village en ont eu assez ; ils ont pris leurs fourches
et ils ont forcé l'inquiétant personnage à déguerpir."
Vous aurez sans
doute repéré dans cette version inattendue les sources événementielles des
quatre "stéréotypes de la persécution" décryptés par Girard dans la forme
classique du mythe d'OEdipe.
Conclusion : il y a OEdipe et
OEdipe
La conception girardienne du mythe d'OEdipe, conception
quelque peu iconoclaste de ce mythe sacro-saint pour tout psychanalyste,
m'est apparue intéressante en cela que, venant de l'extérieur du champ
psychanalytique elle propose, elle aussi, une double histoire de l'OEdipe.
Ses paramètres sociologiques rejoignent en certains points les hypothèses de
Freud bien qu'il s'en distance ouvertement sur d'autres et surtout de
Bion. On y trouve riche matière à réflexion sur ce que je serais tentée
d'appeler "le no man's land" dont il est ici question. No man's land, parce
que lieu topique de rencontre entre la phylogenèse, le fonctionnement
mécanique et la structure processuelle des pulsions, entre la "mimésis" et
le point de départ d'authentiques identifications, ce lieu est à la fois
celui de "1'OEdipe originaire" freudien et celui des premiers linéaments de
"1'OEdipe précoce kleinien, le lieu de la négation de 1'humain et celui des
premiers modèles relationnels qui fondent l'individuation, le lieu de la
non-pensée et celui de la pensée.
Lieu de l'hominisation, mais aussi de
l'horreur dévastatrice, il dépendra de l'établissement des premiers liens
interpersonnels qu'il devienne, au travers de la régression, un lieu de
ressourcement de l'individu dans les pensées du rêve, ou un lieu de "terreur
sans nom".
Pour nous, psychanalystes, il me paraît absolument primordial de
clarifier nos conceptions concernant notamment la nature de ce que nous
appelons "Surmoi" et de ce que nous nommons "culpabilité". Je proposerais
volontiers de réserver ces termes à l'organisation individuelle de la
psyché, telle que je l'ai rappelée au cours de cet exposé. Il resterait à
trouver des vocables pour évoquer leurs "jumeaux mimétiques" au niveau de la
mentalité de groupe.
Freud n'y est qu'à moitié parvenu en ajoutant au
père la horde primitive ; Bion qui, pourtant, a pu distinguer si
clairement les mécanismes groupaux des processus individuels, a
échoué, comme je vous l'ai indiqué en passant,
pour ce qui concerne le concept de culpabilité ; M. Klein, bien
que ne s'étant pas préoccupée des
phénomènes de groupe, était allée plus loin
sur ce point en recommandant de distinguer la "culpabilité
précoce" de la "culpabilité oedipienne", mais ceci, en
toute logique, prenait place dans sa description de l'organisation
psychique individuelle, seule prise en compte dans ses travaux. Enfin,
ce "no man's land" ne pourrait-il pas être
considéré, en 1992, comme le lieu de ce que Freud, puis
M. Klein, puis Bion lui-même, ont désigné sous le
vocable "d'Instinct de Mort", avec tout ce que l'accolement de ces deux
termes suscite comme malaise et comme incapacité de
représentation en chacun de nous ? Lorsque M. Klein
désigne l'envie comme une "pure culture d'instinct de mort", ne
nous est-il pas permis d'y entendre son désespoir de ne pas
parvenir à décrocher certains patients de leur
mentalité de groupe pour les arrimer dans leur vie d'individu
unique et irremplaçable ?
Je
suis persuadée que, dans la clinique quotidienne, une progressive clarification
de la différence entre mentalité de groupe et fonctionnement individuel peut
modifier notre écoute, et surtout améliorer notre capacité d'intervention
thérapeutique. Telle est, du moins, le fruit de mon expérience personnelle.
Résumé
Considérant un individu donné, venu demander
une aide psychanalytique parce qu'il est pris dans un problème existentiel
quelconque, l'auteur cherche à déterminer la part prise par les "mécanismes
de non-pensée" inhérents à la mentalité de groupe, dans l'ensemble d'une
organisation défensive contre le conflit intrapsychique individuel.
Summary
Considering a given individual who is asking
for psychological help because he or she is caught in any kind of
existential problem, the author tries to sort out the role of "non-thinking
mechanisms" linked to group mentality, amongst the defensive organization
against individual intra-psychic conflict.
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